samedi 5 mars 2016

"Noir", mon Opportunité.

 J'ai longtemps considéré que le terme "noir" était malédiction, car on sait que le terme "noir" est chargé très péjorativement en occident et renvoi à des catégories sociales assez misérables instinctivement -souffrance, peine, pauvreté, délinquance... champomy ! Et plus fondamentalement, je déteste être défini par quelqu'un d'autre. J'ai donc toujours ressenti cette image comme une prison de l'esprit, ce qui me frustrait lorsqu'elle se manifestait dans le monde vide.

Or, le temps passant, la maturité aidant, je me dis aujourd'hui que c'est une opportunité. "Noir" me rappelle que si je ne parviens pas à imposer ma volonté quant au personnage que je souhaite être, c'est que je ne maîtrise tout simplement pas ma propre image. Ce malaise me rappelle à quel point il faut me mobiliser, créer mes propres circuits de richesses, pour retrouver ma capacité à raconter qui je suis. C'est donc une bonne chose. Soyons mal à l'aise avec ce terme de “noir” qui nous invite à travailler jusqu'au jour où l'on disposera enfin des ressources pour moduler notre identification sociale. Je le répéterai donc toujours avant l'autre ; “je suis noir !”,   je m'entends, “c'est encore un autre qui me raconte, merci de m'avoir rappelé que ce n'est pas le moment de ronfler, gratitude”.

Ne dis-je pas déjà "amen !" avant qu'un croyant ait fini sa phrase, de sorte qu'il croît en l'intervention divine pendant que je prends possession de ses richesses ? 

Je suis un entrepreneur, bâtir la réalité est ma vocation... Ainsi, tout ce qui m'empêche de m'endormir est bon pour moi.

dimanche 28 février 2016

N'aie pas peur de dominer - apologie de la compétition

Dire que la compétition engendre la haine,
qu'elle n'est qu'une façon de diviser les hommes,
qu'elle nourrit de l'égo, de la peine et du désordre,
pour justifier de refuser le conflit, la confrontation, 
la rencontre avec l'autre dans l'adversité, cette situation intense...
Une excuse de plus, une excuse, encore,
parmi tant d'autres.

Ceux qui veulent atteindre les sommets de leur vie,
ont bien raison, d'aimer la compétition,
la compétition dis-je, celle où l'on émule, on l'on respecte,
où l'on cherche, certes, à vaincre sans faillir, mais en appréciant,
la beauté de l'effort,
et la valeur de son adversaire.
Où l'on cherche, aussi, à Se vaincre soi-même,
sans faiblir, en appréciant, la beauté de cet effort,
et celle de notre propre valeur.

On ne naît jamais décideur, jamais.
On le devient, toujours.
Et si l'on aspire à faire partie des dirigeants,
de ceux qui "font la différence",
il faut dès à présent prendre l'habitude de se confronter,
et dominer l'adversaire. Apprendre à défaire...
Pour que cela devienne un instinct, un geste naturel,
une pensée sans effort, sans contrainte ni peur,
une victoire sans combat.

Les places sont peu nombreuses, et seuls les meilleurs,
seront, naturellement, sélectionnés.
Faire de la compétition, une habitude,
c'est faire preuve de lucidité sur le destin que l'on s'est choisi.
Les dominés haïssent la compétition,
les aspirants-dominants en apprécient toute la beauté, toute la saveur,
toute la grandeur. Chacun équilibre ainsi son destin.
L'objectif du compétiteur,
est de s'entraîner à chaque instant, avec tout son cœur,
donner le meilleur de lui-même,
se dépasser, déployer sa grâce...

La populace ne cesse d'affirmer que la compétition est malsaine,
mais exige dans le même temps pour la servir, 
des hommes de haut vol, 
qui doivent s'affronter pour elle, 
qui doivent lui prouver, toujours,
qu'ils sont les meilleurs et qu'ils incarnent l'excellence humaine.
Elle veut des hommes forts, les meilleurs hommes en fait, et aussi,
les meilleurs services, les meilleurs produits,
les meilleurs idées et réalisations, quel que soit le prix à payer.
Mais elle affirme à voix haute, que bien évidemment, la compétition,
c'est le mal. Puis elle la rejette dans un geste spectaculaire, 
avant de prôner l'union dans la coopération.
Hypocrisie populaire.
L'idée que la compétition est malsaine, qu'aimer la compétition,
c'est être déséquilibré, n'est qu'une croyance limitante parmi tant d'autres.
La populace se la répète jusqu'à plus soif,
afin de s'enorgueillir et de sublimer, tout simplement,
sa posture de dominée. Chacun équilibre ainsi son destin.

Mais toi, qui comme moi, aspire à devenir décideur, leader ou entrepreneur,
qu'importe le nom que tu donnes à ton accomplissement,
ne crains pas l'adversité, épouse là, deviens son ami,
deviens meilleur que les autres, distingue toi, envole-toi, libère-toi.
En revanche, jamais, ne fonde ta valeur personnelle sur un résultat donné.
Car la vie est vivante, et rien n'est jamais acquis.
Si tu perds, tu gagnes parce que tu apprends,
Si tu vaincs, tu dois encore vaincre, la compétition a déjà commencé...
Toujours, prend plaisir à te confronter aux autres,
en les respectant,
et en ayant de la gratitude pour leur présence.
Aie de la gratitude pour le défi qu'ils représentent,
ils t'aident à grandir. Ils t'incitent à repousser tes limites...
les dominer est un honneur.
Ceci dit, garde à l'esprit,
qu'à peine les as-tu dominé, 
ils redeviennent instantanément tes plus redoutables adversaires...
Toi et tes adversaires, êtes pris dans un élan existentiel,
qui vous amène sans cesse à repousser vos limites.
Vous êtes à vous-mêmes, vos exhausteurs de talents,
vos catalyseurs de génie...
Apprend à aimer tes adversaires,
ils sont l'une de tes richesses les plus précieuses.
traite-les avec dignité.
Respecte-les en donnant le meilleur de toi,
au point qu'ils aient la certitude,
de n'avoir aucune chance.

C'est la plus belle marque de considération, de gratitude,
que tu puisses offrir.




lundi 7 décembre 2015

L'échec : un ami, un allié, un camarade fidèle qui vous veut du bien.

Au fond, qu'est-ce que l'échec ..?

On définit l'échec comme "le résultat négatif d'une tentative, d'une entreprise, un manque de réussite ; défaite, insuccès, revers, (on dit) : subir un échec" (Larousse). On voit à travers cette définition une dimension négative à ce sujet, qui incite au rejet, au refus de l'échec, voire  le cas échéant, à sa négation. L'échec. Défaite humiliante subie sur le théâtre d'opération existentiel. Brrr... ça fait froid dans le dos.

Dans ma vision du monde, j'ai défini l'échec différemment afin de démystifier ce phénomène. A mon sens l'échec est autre chose. Je pense que ce que l'on nomme "l'échec", correspond en fait aux conséquences de l'échec
Je m'explique. 

L'échec c'est avant tout une mauvaise décision qui produit à terme des résultats négatifs et de l'insuccès. On pourrait dire que l'échec est une mauvaise décision qui, ensuite, produit un insuccès. L'échec et l'insuccès   : deux phénomènes alors clairement distincts. 
En effet, l'échec est un processus évolutif s'enracinant dans une mauvaise décision qui se développe jusqu'à produire des conséquences ultérieures perçues comme négatives. Telle est la définition que j'ai retenu du concept "d'échec". De l'origine du processus à son aboutissement, c'est avant tout une stratégie inadaptée qui finit par produire des effets indésirés. 
Or, trop souvent, l'on ne définit l'échec que par ses conséquences ! Ainsi, on oublie que le point focal, ce sont ses causes, qu'il faut relever posément et sans se faire violence -oui oui ;) !  Il n'y a rien de grave à réaliser des échecs. L'insuccès qui en découle est surtout une opportunité qui nous permet de progresser. Elle nous permet de savoir s'il faut redéfinir notre stratégie, nos schémas de pensées, des manières de faire, etc. qui nous éloignent de vos objectifs. 

L'échec est donc un précieux allié, car il vous alerte sur le fait que vous produisez des décisions inappropriées. C'est l'indicateur vital qui vous invite à changer de voie. Cela ne vous remet nullement en cause en tant qu'individu, mais remet en cause votre manière d'agir et les stratégies que vous mettez en place. Vous n'avez même pas besoin de vous juger, c'est votre stratégie qu'il faut revoir. Plutôt agréable non ? Pourtant, beaucoup d'entre nous ont appris que l'échec : c'est eux ; que leurs résultats : c'est eux, eux, eux, et qu'ils ont bien raison de culpabiliser ! Alors qu'au fond, l'échec n'est que le résultat d'une action inappropriée, comme l'eau qui boue est le résultat d'une source de chaleur importante qui l'amène à dépasser les cent degrés.
Comprenez moi et lisez cela attentivement : quand vous vous fustigez d'un échec, que vous vous dites que vous êtes nul ou que vous auriez dû savoir (malgré toute votre bonne volonté dans votre préparation), vous pratiquer de la superstition. Pourquoi ? Car tout comme les hommes des cavernes disaient que le feu est agressif et c'est pour cela que l'arbre brûle, vous-vous dites à vous mêmes que vous êtes nulle ou que vous auriez dû mieux faire car c'est ainsi qu'agit une personne qui dispose d'un bon potentiel. Sans analyser le phénomène qu'il y a derrière, sans vous demandez pour quelles raisons votre stratégie fut inappropriée. Le feu est méchant, et vous auriez dû mieux faire car c'est la nature qui le veut. Vous voyez ? Permettez-moi donc de vous le dire, c'est votre stratégie qu'il faut revoir : vous pouvez vous laissez tranquille ;).

C'est pourquoi je trouve la définition du Larousse inappropriée : nos amis de l'Académie française ont produit eux-mêmes un échec en définissant l'échec (comble du comble). Lisons ensemble : “Défaite, insuccès, revers, (on dit) : subir un échec”, quelle violence ! La rue Ulm a vraiment dû leur rester au travers de la gorge. Cette définition est censée nous aider à mieux comprendre et donc, bien vivre l'échec ? Hmm, je suis perplexe.... C'est pourquoi j'ai produit ma propre définition : “une décision inappropriée produisant à terme des résultats négatifs ou indésirés”. Je trouve qu'on est déjà plus calme, plus zen, plus accueillant. Venez, il n'y a aucune mine planquée sous le tatami ;). 
Et c'est tout. Ni vous, ni le monde, ni l'univers ne sont à remettre en question, juste une décision inappropriée. Et depuis que je définis l'échec ainsi, je recherche la décision, la petite habitude, la petite façon de pensée inappropriée au lieu de m'en prendre à moi où à l'univers. Et ça marche, je suis beaucoup plus zen !
Je suis non seulement relax avec l'idée de l'insuccès car je sais que je ne peux pas tout savoir et donc que la possibilité que je finisse par faire un choix inappropriée tôt ou tard est quasiment de 1, mais aussi, je sais que les fruits de mes mauvaises décisions sont une potentielle source de progression, et même d'importantes progressions. Et depuis, je fonce sans avoir peur, je suis prêt à accepter de ne pas tout savoir. Et ceux qui vous demandent de toujours être approprié, et toujours choisir la bonne stratégie, le parcours sans faute, dites-vous que, c'est peut-être leur perception des choses qui est inappropriée ! Avoir toujours raison, faire toujours des sans fautes : en fait, tout savoir, quelle pression ! Pour déployer notre plein potentiel, il faut accepter nos limites : nous ne savons pas tout, et nous sommes par nature des être imparfaits. La nature n'a produit aucun être parfait sur cette terre, et dans l'univers en général, donc laissez tomber, c'est hors de portée ! C'est tout simplement hors de portée d'un humain. En revanche, faire de son mieux, sereinement, et tout faire pour atteindre son plein potentiel maximal est à portée de n'importe qui, notamment si l'on accepte d'échouer, si l'on accepte la possibilité de prendre des décisions inappropriée -à notre insu s'il le faut. Si vous acceptez l'idée d'échouer, vous progresserez constamment vers vos objectifs, même (surtout ?) lorsque vous rencontrerez l'insuccès ;) ! Et oui, si vous l'accueillez avec bienveillance, l'échec devient lui même bienveillant.

Si vous comprenez cela, vous comprendrez que l’insuccès est l'un de vos alliés les plus précieux dans votre existence. Il vous fournit de précieuses informations sur la pertinence de vos stratégies. L'échec, c'est l'agent de renseignement qui vous indique que vous venez de faire péter une bombe au mauvaise endroit. Cela vous alerte, on réalise qu'un truc cloche ; on se dit qu'on pensait avoir toutes les informations, mais en fait non. Donc on cherche, et on comprend que la cible n'était pas si loin, mais qu'il faut revoir son plan d'action. Parfois on peut même réparer les murs abîmés, etc. D'autres fois, il n'y a plus rien à sauver, il faut faire son deuil, et éventuellement changer sa façon d'agir. 

Comprenez autre chose : ceux qui aujourd'hui se trompent rarement sont ceux qui se sont beaucoup trompés dans le passé (ou ont bénéficié de l'expérience d'autres personnes qui s'étaient trompées avant eux !). L'échec les a directement ou indirectement formé, et permettra à ceux qui les suivront d'aller beaucoup plus vite, plus loin. 
Quant au jugement de valeur que vous pouvez produire sur vous mêmes à l'occasion d'un échec, ça, c'est juste votre propre opinion et elle n'engage que vous : deux entités différentes. D'ailleurs ajouter à une stratégie inappropriée un jugement dénigrant sur vous-mêmes, c'est comme ajouter de l'échec à l'échec. Vous rendez votre stratégie encore plus inappropriée.
Acceptez que dans la vie, parfois on se trompe. C'est comme ça ;) ! D'autres fois l'on est totalement certain que l'on a tout compris, que l'on tient fermement le cap et puis un beau jour, on réalise que depuis le début l'on n'avait absolument rien saisi car il nous manquait quelques informations essentielles, voire, une seule et unique petite information qui change la donne. Tout à coup, toutes les décisions que prises depuis "l'instant T” deviennent autant d'échecs passés, autant de décisions désormais perçues comme inappropriées. Alors, si vous en auriez eu le pouvoir, peut-être auriez vous intégralement revu cette partie de votre existence. Mais vous êtes cloué dans le présent. Heureusement, vous avez compris que l'échec est normal et qu'il faut accueillir l'insuccès comme une mine d'or informationnelle. Vous accueillez ces nouvelles avec bienveillance, vous adaptez votre stratégie, et vous foncez loin devant. Et au fond, c'est normal. Est-ce que l'on rumine dix fois un article de journal avant de prendre acte des informations qui s'y trouvent ? Non, eh bien vous faites exactement la même chose avec vos échecs : vous recueillez l'information, vous adaptez votre stratégie, et vous repartez de l'avant. 

Si vous comprenez cela, vous comprenez donc qu'il est inutile d'avoir peur de l'échec, car à chaque instant de notre vie, il est possible qu'une décision inappropriée soit prise, et produise ensuite des résultats négatifs ou indésirés - sans que l'on n'ait forcément conscience de ce qui est en train d'arriver. La vie est  un mystère, il faut la vivre au lieu de vouloir la résoudre disait le sage. Et il avait raison. J'ajouterai que la vie est mystère, et qu'il faut vivre nos échecs au lieu de vouloir les résoudre. Puisque l'incertitude fait partie de la vie, l'échec en fait aussi partie, nécessairement.

L'important, c'est le rebondissement et la prise en compte de l'information produite. L'important, c'est l'adaptation de votre stratégie. Si vous avez cela bien en tête, les fruits de l'échec vous permettront de maximiser vos possibilités de succès. Accueilli avec bienveillance, l'échec devient bienveillant.

Acceptez donc d'échouer : c'est normal. L'important étant d'en retirer les leçons possibles pour évoluer et ainsi de suite. C'est pour cela qu'on dit, la première fois, c'est une erreur, la seconde, une faute. En fait, l'idée est : tant que tu ne réalises pas que ta stratégie est inappropriée tu es dans l'erreur, et le jour où tu en prends conscience mais te montre borné, tu mets volontairement en péril l'atteinte de tes objectifs -analysé alors comme un manque de responsabilité. 

Et puis je vais vous dire, tous les Dieux de ce monde ont aussi échoué : ils se sont dit bienveillant et ont créé une nature basée sur la prédation. Ils ignoraient peut être, du haut de leur omniscience, qu'une partie de l'humanité aurait aimé voté pour faire entendre son opinion démocratiquement. Peut être aussi qu'ils se fichent divinement de l'avis des humains et qu'au moment où j'écris ces lignes, ils sont dans un bain d'étoiles, sirotent un alcool de supernova et estiment être à la tête d'un succès total en admirant leurs doigts de pied. Ah oui, l'échec est aussi une question de perception, mais ça c'est une toute autre histoire ;). Ici, je vous parle depuis vos propres objectifs et votre propre perception. 

Bref, l'échec, l'incertitude, la volonté de réussir sans aucune garantie de succès, tout cela fait partie de la vie. En fait, tout cela, est, la vie. Gardez à l'esprit que vous n'avez aucune certitude, et que c'est normal. Vous pouvez simplement faire de votre mieux, et c'est d'ailleurs la meilleure chose à faire.
Peut-être qu'à la fin de votre vie vous découvrirez que tout ce que vous avez fait depuis le départ était basé sur de faux calculs, et que, ayant pris connaissance d'informations qui vous échappaient jusque là, vous découvrirez que votre vie entière est un échec. Acceptez-le de bon cœur, vous aurez été au centre même de l'existence sans le savoir : incertitude, absence totale de garantie... Vous écrirez un livre optimiste : "Moi aussi, j'avais des certitudes" et deviendrez le gourou de l'échec admiré pour les siècles des siècles. 

Si vous voulez être en accord avec vos échecs, et vivre tout cela de manière zen, je pense qu'il est important de connaître votre histoire. Mon opinion est qu'il est plus difficile d'accueillir l'échec comme une source d'information prête à être exploitée si vous ignorez votre propre histoire. Il y a une raison à cela : pour comprendre qu'une stratégie est inappropriée, il faut déjà réaliser qu'elle puisse l'être, ce qui implique de comprendre qui l'on est et de quelle manière l'on s'inscrit collectivement dans l'histoire contemporaine, et l'histoire au sens du “Temps Long”. A mon sens une histoire individuelle s'inscrit aussi dans la trajectoire d'une lignée, d'un peuple, d'une civilisation. Peut-être vaut il mieux comprendre dans quel contexte l'on s'inscrit globalement pour saisir des dynamiques qui nous auraient sûrement échappé autrement ;). A chacun de voir selon ses propres valeurs et croyances. 

A bientôt !


mercredi 2 décembre 2015

Le problème de solidarité entre les subsahariens ? Une fausse question.

 Dans les communautés subsahariennes, on peut être vite tenté de céder à la tentation de l'insulte et du dénigrement pour expliquer que nous ne faisons pas de projets ensembles, que nous ne nous soutenons pas, etc. Nous serions étiquetés “pas solidaires” (tel un label rare d'une élite particulièrement distinguée...). Mais au juste, qu'est-ce qu'”être solidaire” pour commencer ? S'aimer ? Se faire des calins dans la rue ? Se porter le panier de course jusqu'au 15 ème étage quitte à faire du réperage pour trouver LA personne qui a besoin de vous quelque part dans la ville ?

C'est quoi être solidaire ? Très vague comme propos. Les subsahariens doivent garder à l'esprit que nous sommes les héritiers d'un désordre social et d'une déliquescence globale héritée de nos défaites passées. Les générations précédentes n'ayant pas repris en main le travail de reconstruction, nous sommes, en 2015, quasiment au même point qu'il y a 80 ans.
Parler dans ces conditions de “non-solidarité” est un non-sens. En effet, comment être solidaire et donc, loyal, quand vous êtes :

  1. complètement dispersés sociétalement, dans un désordre total
  2. excessivement dépendant de la communauté qui vous domine (en particulier les européens) et qui vous octroie des ressources pour survivre en l'échange d'une loyale docilité 
  3. ne disposez d'aucun gouvernement ou aucune institution publique en mesure politiquement de vous donner des instructions générales pour adopter un comportement globalement uniforme et suffisamment bien orchestré (mon propos n'est pas ici de dire que "tout est de la faute des présidents corrompus", au contraire, je dis doublement qu'il appartient à la société civile de se prendre en charge, remettre sur le dos de quelques hommes la débâcle de centaines de millions d'autres relève, au mieux, de la mauvaise foi)
  4. etc. etc. etc.

La solidarité n'est donc pas le souci des subsahariens, leur véritable souci étant qu'ils sont surtout complètement dispersés et abandonnés à leur sort. On a hérité du désordre, et on vit dans le désordre. Encore une fois, cela n'empêche en rien notre fleurissement. Simplement, c'est un paramètre à prendre en compte pour l'établissement d'une stratégie quelconque -cf. mon article sur "l'échec". Il est évident que l'idée que notre salut proviendra soit d'un élan collectif simultané, soit du sursaut d'une quelconque administration est aujourd'hui une utopie. Et se servir de ce prétexte pour ne rien faire relève d'un défaitisme entièrement coupable. Il y a une voie, mais elle est le reflet de notre situation. Explications. Avant de parler de solidarité, on devrait déjà se demander comment reprendre confiance en nous, comment repartir sur des bases plus solides, afin de partager à nouveau des projets, des constructions collectives, des victoires. Afin de partager de défis qui font lien, et qui souderaient des groupes éparpillés, autour d'intérêts communs (intérêts qui existent bel et bien, inutile de le préciser).
Quand je parle de projets, je parle de projets économiques. Pourquoi ? Car vous ne pouvez prétendre créer des projets fédérateurs si celui qui vous permet de le monter est le même qui vous maintien à terre et dans la dépendance. La fédération n'est possible que dans la dignité, et donc, l'indépendance. De plus, les subsahariens doivent cesser de s'imaginer qu'ils ne peuvent qu'être esclaves de sociétés étrangères, et comprendre que leur dignité retrouvée commencera par la conscience de pouvoir d'abord créer sa propre richesse pour son propre bénéfice. Les subsahariens ont atteint un tel stade d'aliénation que bon nombre n'imagine pas que la seconde voie est possible, et encore moins, qu'elle est souhaitable. C'est ce qui distingue la frange éclairée, l'élite ancestrale de notre population de sa masse aliénée. Travailler pour soi, créer sa propre richesse. Source première de fierté et de dignité sociale : préalable à toute entreprise plus ambitieuse encore.

Seulement, comment faire avec une communauté qui partage des intérêts communs mais ne veut pas montrer qu'elle diverge avec les intérêts de ses prédateurs, car il faut bien rester docile pour être toléré et avoir droit à quelques miettes ? Comment faire avec des gens qui ont peur d'affirmer leur identité et qui jouent de ce fait, un double jeu où il tirent sur la corde qui les étrangle ? Par où commencer pour recréer cette fameuse “solidarité”, ce soutien commun ?
Eh bien, déjà, commençons par le commencement : réunissons-nous autour de projets qui permettent d'assurer notre développement. Ecoutez, je ne parle pas de projets qui engloberaient 500 millions de subsahariens dans une tâche pharaonique. Loin de moi cette idée : ce serait proposer de commencer par la fin. On propose de commencer par la fin quand on affirme qu'il faut de la solidarité dès maintenant et séance tenante pour 1 milliards d'individus subsahariens sous prétexte que c'est moralement souhaitable. Comprenons que cette fameuse solidarité découle avant tout d'une confiance que des personnes ont envers d'autres grâce à la certitude qu'elles partagent à l'instant T des défis, des risques, des intérêts, des espoirs communs, et qu'elles les mettent concrètement en oeuvre. C'est cela qui suscite la solidarité, pas autre chose. Même l'Union sacrée demeure une affaire de petits calculs quand est fragilisé. Il faut en passer par là. 
Où je veux en venir ? Au fait que la solidarité est une fausse question. La véritable question que l'on devrait se poser est : comment nous fédérer, d'abord par micros groupes, et le temps passant, vers des groupes de plus en plus importants (par fusions, par attraction de nouveaux membres, etc.). Se fédérer autours de projets lucratifs est le véritable défi. Lorsque des subsahariens, par petits groupes de 3, 5 ou 10 personnes commencent par se réunir autour d'une table pour discuter sérieusement d'entreprendre, ils entrent dans une dynamique positive et solidaire. Pourquoi ? Car ils sont dans l'action concrète, non dans la bavardologie.
Ils ne dépendent plus des prédateurs pour s'entendre dire comment ils doivent être docile pour ramasser une miette tombée de la table à la fin du mois ; ni qui ils doivent aimer ou détester pour être jugés dociles et donc, convenables. Coupez le cordon ombilicales avec votre prédateur, rompez la dépendance et manger les fruits de votre propre jardin. Alors seulement, les subsahariens avanceront vers la liberté et tout ce qui en découle de constructif, de positif.
La solidarité est une fausse question, car la solidarité découle naturellement de la fédération et non l'inverse ! Quand vous êtes fédérés (même si vous n'êtes que 5, c'est déjà une victoire), vous commencez à vous demandez ce que vous pouvez faire pour changer la donne au lieu d'accuser l'autre de votre propre misère et inaction. Vous commencez enfin à construire, bâtir, et vous retrouvez une certaine fierté dans cette indépendance, cette autonomie, cette maîtrise d'un destin qui n'aurait jamais dû vous échapper. Votre destin n'appartient qu'à vous, ni aux européens, ni aux gouvernements africains. Plus tôt vous l'admettez, plus tôt vous vous en sortirez. 

Si l'on part du principe que 5 subsahariens se fédèrent et bâtissent, ils finiront forcément par rencontrer 5 autres subsahariens qui seront dans un projet similaire ou connexe, puis 10 autres, puis 20 autres, puis 100, etc. Encore une fois, la solidarité ne vient pas du haut vers le bas où on décrète que 5 millions sont solidaires, donc cela permet à 5000 groupes d'agir ! Pas du tout ! La solidarité part du bas vers le haut avec 5000 tous petits groupuscules qui ont commencé à agir, 5 gouttes d'eau, puis une vague, enfin une gigantesque lame de fond basée sur la défense concrète d'intérêts communs. Comme le dit un proverbe subsaharien : un millions de gouttes sont descendues de la montagne pour former un fleuve. Autrement dit, si chacun travaille de son côté, on finira nécessairement par se croiser en chemin.

En ce qui me concerne donc, la solidarité, je n'y crois pas une seule seconde. Ou plutôt, j'y crois -car elle est indispensable à toute entité sociale-, mais comme un résultat et non comme une condition de départ ! J'ai compris à travers mon expérience que demander à des subsahariens d'être solidaires sans leur expliquer en quoi cela sert leurs intérêts ni ce qu'ils ont à y gagner vous mènera droit dans le mur. Les gens veulent du concret, et veulent servir leurs intérêts : c'est comme ça, personne ne veut prendre de risque sans la certitude d'une récompense en aval. Mais si vous leur expliquer qu'il faudrait monter telle ou telle entreprise afin de mettre en avant un aspect spécifique de leur culture, et, cerise sur le gâteau, en empochant de l'argent frais pour le business créé, alors je vous garantis que de très nombreuses personnes vont accourir pour se lancer. Pareillement en ce qui me concerne, je ne vois pas pourquoi je devrai me forcer à aimer des subsahariens alors que je ne défend aucun de nos intérêts à leur côté.
Mieux vaut être étrangers les uns aux autres et être tous actifs que dépenser inutilement notre énergie à vouloir suivre un dogme sans issue. Nous gagnerions à nous recentrer sur nos priorités absolues qui sont de revaloriser notre matrice culturelle et retrouver une autonomie économique. Et pour y arriver, chacun doit penser “action”. Chacun ne doit se solidariser qu'auprès des personnes qui l'aideront à atteindre ses objectifs, soit créer de la richesse subsaharienne. Nous sortirons alors ipso facto de cette passivité qui nous ronge et nous enlise collectivement depuis des siècles. 

Vous travaillez dur. Vous y êtes, vous voyez, et un beau jour, voilà cette fameuse solidarité qui surgit merveilleusement.
Enfin, vous travaillez pour vous mêmes. Et vous avez tout compris : de groupes en groupes, c'est ainsi que les subsahariens vont retrouver une vie communautaire digne de ce nom. Plus besoin de mendier des miettes au maître, désormais, vous avez les moyens de financer vous mêmes vos événements, vos réunions autour de vos projets, vos intérêts. Vous êtes vôtre, vous vous réappropriez votre existence.
A ce moment là, on ne se demandera plus où est la solidarité et qui est vraiment solidaire, mais où est la solution pour le dernier projet mis en place. Afin d'avancer, encore un peu plus, toujours plus, vers plus de liberté, et plus d'harmonie.

Si les subsahariens comprennent cela, alors plutôt que de se demander pourquoi les gens ne sont pas solidaires, ils se demanderont plutôt qu'est-ce qu'ils peuvent eux-mêmes mettre en place pour s'enrichir et défendre leur patrimoine civilisationnel. Nous pouvons le faire, mais il faut simplement le comprendre : la solidarité est le résultat, et seulement le résultat.

Inutile d'être trop gourmand au départ, de simples épiceries, des restaurants, des bars aux reflets de l'Afrique subsaharienne, de la vente dans la diaspora de nos produits agricoles transformés sur le continent, de petits centres d'appel -ou autre chose, à vous de trouver enfin ! Tout cela suffira. Commençons petit, et grandissons au fil du temps. C'est ainsi que nous deviendront plus soudés, pas autrement. Ceux qui pensent que la solidarité jaillira du néant via une dose massive de bonnes résolutions, se mettent a minima un doigt dans l'oeil.
De nombreuses personnalités subsahariennes ont déjà compris cela, que nos ancêtres veillent sur elles. Tel le prof Jean-Paul Pougala qui crée actuellement une classe d'industriels africains qui colle exactement à ce que je viens de vous expliquer. Ils étaient 50 il y a 3 ans, ils sont 1300 aujourd'hui.

De ce type d'action, les exemples à travers le monde sont foisons, et je crois bien que c'est une règle générale. Pour faire naître la solidarité, il faut d'abord fédérer un petit groupe autour de projets concrets avec des résultats tangibles à la clé.
Par exemple, la muraille verte en Chine n'avait mobilisé que des centaines de volontaires au départ, en 1978, et ils sont aujourd'huis des dizaines de milliers venus de tous horizons. Depuis trente ans, ils ont déjà planté 50 milliards d'arbres, l'objectif à terme étant de 100 milliards . Projets fédérateurs = solidarité.

J'en resterai là. De grâce mes chers frères et soeurs subsahariens, n'invoquez plus la solidarité comme on invoque la pluie, creusez plutôt des puits de projets concrets. Vous verrez bien qu'à force de creuser, nous tomberons un jour sur une source d'eau gorgée de dynamisme sociétal. Et cet instant sera d'une saveur que vous n'oseriez imaginer.

Muungano Kuokoa.